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Chez Century 21, nous misons sur un marketing prédictif et très individualisé

Publié le 20/05/2020

 

Le JDN poursuit sa série d'interviews de dirigeants face au coronavirus. Le patron du réseau d'agences immobilières évoque les projets en cours s'inscrivant dans une dynamique de reprise.

Publié par Justine Gay du Journal du Net le 20 mai 2020

 

JDN. Quel a été l'impact de la crise sur l'activité du réseau Century 21 ?

 

Laurent Vimont. Au cours des 8 semaines du confinement, nous avons interdit tout message commercial, hormis "Comment allez-vous ?". Nous avons déconnecté notre système de relance automatique par mail, considérant que ce type de messages serait indécent pendant une telle période. Nous n'avons donc pas fait de transactions, sauf celles que nous avons régularisées via des signatures électroniques, ce qui ne représente que 10% de la production habituelle. Mais plutôt que de perdre notre temps, nous avons incité les agences à retravailler leurs bases toutes les semaines pour les mettre à jour. Nous les avons encouragées à requalifier la base en la segmentant en trois : A, B et C. Avec un sous-segment A+, correspondant aux personnes à recontacter en priorité pour réamorcer la pompe. Et on peut dire que ça a fonctionné. Depuis le 11 mai, des visites ont été réalisées, des ventes ont été faites et des mandats ont été rentrés. Le résultat est clair : les agences qui étaient engagées dans le projet de requalification des bases ont toutes de meilleurs résultats que les autres.

 

Avez-vous observé des changements depuis le 11 mai ?

On a pu voir une demande de la part de Parisiens qui avaient loué une résidence secondaire et qui se verraient bien avoir désormais un projet d'acquisition ; des demandes de personnes vivant dans des appartements en banlieue parisienne ou dans des grandes villes et qui ont des envies de campagne, de maisons avec un bout de jardin. Mais c'est un peu comme les bonnes résolutions du 1er janvier. Entre les inscriptions à la salle de sport en début d'année et leur fréquentation six mois après, il y a une différence. Il est fort probable que des projets mûris entre quatre murs dans des contextes souvent difficiles n'aboutissent pas.

 

Le marché immobilier a été considérablement impacté ces dernières semaines. A quoi s'attendre désormais ?

Plusieurs dizaines de milliers de projets ont été stoppés le jour de la mise en place du confinement. Et on parle de projets de vie, pas de l'achat d'une voiture ou d'une tondeuse. On est sur des décisions lourdes. Ces projets reviennent sur le marché. Maintenant, est-ce que cela sera durable ou pas ? Est-ce qu'on aura une grosse activité dans les mois prochains ? Il est encore trop tôt pour le dire. Notre réponse est de travailler en priorité le stock de clients que nous avions dans nos bases.

Mais c'est un marché qui a un niveau de résilience élevé, avec un niveau de ventes minimum issues des mutations, décès, divorces, etc. Cela représente environ 450 000 transactions par an. Contre un million de ventes prévues en 2020, mais tout de même. Dans ce contexte, les agents immobiliers devront être des multiplicateurs de projets. Ils devront démontrer leur capacité à rassurer. Entre la demande initiale de l'acheteur et la réalité, il y a souvent un écart. L'agent devra jouer ce rôle d'accompagnant. Le juge de paix sera l'évolution des taux d'intérêt. S'ils restent à leur niveau actuel, le marché devrait repartir. Mais en cas de poussée des taux, ce qui n'est pas prévu, il y aura surement une correction.

 

Et en termes de transactions ?

Nous savons que nous ferons moins de ventes en 2020 que ce qui était prévu. Les ventes que nous n'avons pas faites pendant deux mois ne vont pas s'ajouter à celles de juin/juillet. Il va falloir faire œuvre de patience et de proximité, et se dire que tout va être plus long et plus compliqué. Le délai de réitération de l'acte, qui était jusque-là de trois mois en moyenne, va s'allonger. Il va falloir plus que jamais être passionné. Ceux qui voyaient dans ce métier une opportunité de faire de l'argent facile sont appelés à disparaître. Il y aura sans doute une grosse correction dans le volume des collaborateurs de la profession.

 

Au sein du réseau Century 21, quelles initiatives avez-vous mises en œuvre pour la reprise ?

Nous avons fait le choix de travailler ce que nous avions dans les bases et de ne pas réinvestir un euro en communication tant que nous n'avions pas servi ces clients-là, et ça représente déjà plusieurs dizaines de milliers de personnes. Century 21 France est le site le plus visité de l'entreprise immobilière, après les portails d'annonces. Nous sommes à 1,8 million de VU tous les mois et le trafic reprend. Les contacts vont revenir spontanément. Nous avons lancé deux campagnes d'emailing sur la base des agences Century 21. Une campagne d'information sur les mesures sanitaires et une autre aux clients ayant un projet urgent à rappeler en priorité. Soit un million et demi d'e-mails avec un taux d'ouverture de 25%, contre environ 10% d'habitude. Nous en avons aussi profité pour lancer des dispositifs marketing très individualisés, mais nous n'avons pas attendu cette crise pour nous y intéresser.

 

Quelles sont les innovations dans les tuyaux ?

Nous en avons une qui est prête à être déployée et qui permettra, en utilisant les données récoltées depuis 20 ans sur un secteur de façon anonymisée, de détecter les projets de vente dans l'année. Un peu à la manière d'Amazon qui, en fonction des principaux titres de bouquins que vous avez achetés, vous en suggère d'autres. En ce moment, nous travaillons là-dessus, sur le marketing prédictif.

 

Quelles sont les innovations dans les tuyaux ?

Nous en avons une qui est prête à être déployée et qui permettra, en utilisant les données récoltées depuis 20 ans sur un secteur de façon anonymisée, de détecter les projets de vente dans l'année. Un peu à la manière d'Amazon qui, en fonction des principaux titres de bouquins que vous avez achetés, vous en suggère d'autres. En ce moment, nous travaillons là-dessus, sur le marketing prédictif.

 

Avez-vous une idée de calendrier pour ce déploiement ?

Ce sera entre maintenant et la fin de l'année. Il y a un impératif de déontologie derrière tout cela. L'idée n'est pas de donner cet outil aux collaborateurs qui iraient voir les clients directement. On se demande comment faire ça de façon plus subtile. C'est un peu comme notre algorithme d'estimations, qui est très bon, mais que nous avons volontairement détérioré de sorte à ce qu'il donne une fourchette de prix large car, selon nous, une bonne estimation passe par un rendez-vous physique. Mais l'idée est de passer d'un marketing opérationnel très global à un marketing plus ciblé.

 

Avez-vous rencontré des difficultés opérationnelles liées au fait que Century soit un réseau de franchisés dans la mise en œuvre de ces actions ?

ll n'y a pas plus de difficultés avec des franchisés qu'avec des salariés. Je n'ai pas de pouvoir hiérarchique sur eux donc je dois m'assurer que les décisions que je prends sont bonnes et pour nous et pour eux. Nous consacrons beaucoup de temps à expliquer pour mettre en œuvre. Pour animer le réseau, nous utilisons Workplace, de Facebook. Via cet outil, entre 1 500 et 3 000 personnes me remontent chaque jour les actions mises en place. Nous avons aussi une équipe de 35 consultants qui suivent chacun un groupe de 40 agences. Cela dit, on ne force pas à boire un âne qui n'a pas soif. Nos franchisés sont liés par un contrat qui dure cinq ans. Si au terme de celui-ci la question doit se poser de réévaluer la collaboration, elle se pose. Mais en général, ceux qui nous rejoignent le font pour avoir un système à mettre en œuvre, des outils, des méthodes. J'ai d'ailleurs reçu plusieurs centaines de mails de remerciement. Notre mode d'animation, c'est une forme de "démocrature" : chacun a le droit d'avoir un avis, de l'exprimer. Mais comme disait Clémenceau, "pour prendre une décision, il faut être un nombre impair de personnes, et trois c'est déjà trop."

 

 

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